J'aime bien les Escape Games. Sans en avoir développé une passion, j'ai dû en faire une dizaine et j'ai toujours passé un bon moment. Ainsi, quand la famille d'Ipemf nous a offert un jeu de société basé sur le concept des Escape Games - sur le thème de l’Égypte antique, en plus ! - j'ai eu fortement hâte de le tester. Ce qui a été fait... Littéralement le lendemain. Et comme j'adore faire des articles sur des sujets qui n'entrent dans aucune catégorie de ce site, j'ai donc décidé de continuer sur cette voie et de vous dire un peu ce que j'ai pensé de La Malédiction du Sphinx, par Deckscape.
Tout d'abord, pour celleux qui n'ont nullement eu l'occasion de tester les Escape Games, voici une rapide présentation du sujet.
Les Escape Games sont des jeux de coopération de résolution d'énigme et de puzzles. Ces jeux sont scénarisés et mis en scène par des acteurices qui vont présenter l'intrigue ainsi que le but à atteindre au groupe de joueureuses, avant de les guider vers un endroit clôt, en général organisé pour simuler une pièce réelle (salon, laboratoire, bar, chambre...) en lien avec le scénario. Dans cette pièce se trouvent les indices permettant aux joueureuses de résoudre des énigmes et de débloquer l'accès à d'autres pièces, d'autres indices et d'autres informations. Le jeu se termine lorsque les joueureuses ont rempli la mission qui leur est donnée (exemple : Trouver la pokéball que Seto Kaiba a caché dans la cave secrète de Magnéto), qui implique en général de débloquer l'accès à une sortie dédiée (d'où le mot escape, s'échapper). Le tout est chronométré : en général, le groupe dispose d'une heure pour terminer la partie.
Comme l'imagination humaine est extrêmement riche, il existe énormément de variations possibles, à la fois en terme d'univers, d'ambiance et de fonctionnement. Cela rend chaque partie unique, ce qui contrebalance le fait que la plupart des Escape Games ont peu d'intérêts à être refait par une même personne puisque les énigmes sont déjà connues.
Recto-verso de la boîte. Tourelle de Symmetra pour échelle.
(Vous pouvez cliquer sur l'image pour mieux lire le texte)
Maintenant que les grandes lignes ont été posées, revenons à La Malédiction du Sphinx.
Le jeu est composé d'un deck de cartes numérotées. Les premières présentent les règles globales du jeu et le matériel nécessaire (des feuilles de brouillon, de quoi écrire, et une montre), puis les suivantes présentent l'histoire, peuvent constituer des objets/indices qui sont à mettre de côté, servent à indiquer des énigmes, etc... Comme je ne souhaite pas vous gâcher le plaisir de la découverte, je tâcherai de rester vague sur le contenu afin que votre propre expérience soit aussi plaisante que possible. Chaque carte du deck est numérotée afin de suivre un ordre précis (celle du fil de l’histoire et des énigmes, afin de permettre au groupe de joueureuses de toujours avoir les bons objets au bon moment). Chaque fin de carte indique quoi faire : lire le dos de cette carte, passer à la carte suivante, où aller si la réponse à l’énigme n’était pas correcte, faire des piles distinctes avec certaines cartes à l’aide des numéros et d’un code couleur, etc...
Globalement, l'adaptation en cartes est extrêmement intéressante. Le système de deck et de numérotation permet de lire une énigme sans risquer d'en voir la solution (celle-ci étant sur la carte suivante, en-dessous dans le paquet) et, lorsque c'est prévu, de facilement diviser le deck en plusieurs parties grâce à un code couleur (permettant de suivre plusieurs énigmes à la fois, ce qui équivaut aux phases de recherche et de résolution d'énigmes dans le jeu grandeur nature, où l'équipe peut se diviser les tâches). C'est plutôt bien pensé, cela permet de ne pas avoir besoin de beaucoup de matériel ou de trop s'y perdre.
En général, dans un jeu d'Escape Game grandeur nature, une personne est chargée de suivre l'évolution de l'équipe et peut occasionnellement leur donner des indices. Les modalités varient d'un jeu à l'autre : les indices peuvent être demandés par l'équipe ou donnés spontanément par la personne, le nombre d'indices par partie peut être limité ou non, l'indice peut être plus ou moins clair et transmis de différentes manières : affiché sur un écran, transmis de vive voix par talkie-walkie, amené habilement par un'e acteurice... Ici, point de Génie qui apparaîtrait en frottant la boîte : les indices sont listés sur une carte dédiée, notés à l'envers (comme si ils étaient lus dans un miroir), ce qui permet d'éviter de lire des indices par accident et qui peut rajouter du défi à la lecture. Je trouve ce système bien pensé, permettant d'aider les équipes qui ont des difficultés à résoudre l'énigme tout en pouvant être totalement mis de côté par celles qui préfèrent tout résoudre elles-mêmes.
Présentation des cartes avec numérotation visible.
Toutefois, le jeu présente également de nombreuses failles, ce qui a pu gâcher un peu notre expérience personnelle.
En premier lieu, il y a BEAUCOUP de texte, ce qui fait perdre énormément de temps de jeu. Nous avons joué à quatre personnes, ce qui nécessitait déjà qu'une personne prenne le temps de lire à haute voix le scénario ou les énigmes pour que tout le monde aie les informations en même temps. Le problème, c'est qu'entre vivre une situation et la lire, il y a une différence. Lorsqu'une personne entre dans une salle et voit une malle, cela lui prend moins d'une seconde pour traiter l'information, beaucoup moins de temps que de lire « Vous entrez dans la salle suivante. Prenez les cartes 20 à 25 (rouges) et 25 à 30 (vertes) et faites-en deux piles. », d’exécuter les instructions, et de lire sur la première pile « Dans cette salle se trouve une malle. [insérer suite de l'énigme ici] ». Il me semble absolument aberrant de prétendre terminer ce jeu en moins d'une heure sauf à en passer tout l’aspect scénarisé, qui constitue à la fois une partie de l'intérêt du jeu (sinon autant s'acheter un livre d'énigmes), des instructions, des indices ainsi qu’un rôle immersif.
Par ailleurs, au vu de certaines énigmes, j'ai trouvé que la dimension des cartes était parfois trop petite, ne permettant pas de bien observer certains détails importants pour la résolution. Par ailleurs, ces dimensions ne permettent pas non plus à un groupe de plus de 2 à 3 personnes de consulter la carte simultanément, ce qui peut être frustrant.
Certes, le problème pourrait être réglé au moins partiellement si, comme dans un véritable Escape Game, il était possible de se diviser le travail, notamment quand il y a plusieurs énigmes en cours. Ce qui, au vu des contraintes de temps et de la logique des Escape Game, devrait logiquement être le cas, sauf que... Il n'en est fait mention nulle part ! La seule information donnée est la suivante : « Vous pouvez discuter librement entre vous pour trouver la solution, et lorsque vous vous êtes mis d'accord vous pouvez retourner la carte pour vérifier si cette réponse est correcte». Un peu vague, non ? Pour notre part, nous avons pris la liberté de nous diviser par moments (lorsque plusieurs énigmes pouvaient être résolues individuellement), par homologie avec les Escape Game grandeur nature et du fait du temps qui nous a vite semblé très limité.
De plus, nous avons relevé une incohérence probablement due à une traduction : sur la carte listant des indices, l'un d'entre eux donne comme instruction de partir d'un mot de la carte d'énigme qui... N'est pas présent sur ladite carte ! L'indice est donc absolument inutilisable, ce qui est dommage quand on sait qu'il n'y en a qu'un par énigme.
Par ailleurs, le scénario, bien que sympathique, n'est pas excellent : la dernière phase de l'histoire change abruptement l'ambiance et les enjeux de la partie. Cela est probablement dû à la différence entre les Escape Game grandeur nature, où les objectifs de la partie sont clairement indiqués dès le début, et celui-ci où vous incarnez un personnage qui se retrouve par le hasard le plus total dans la situation de début. De plus, certaines introductions de personnages sont très abruptes et je ne suis pas particulièrement fan des Pélo Ex Machina, qu'il s'agisse de Palpatouille dans Star Wars 9 ou d'un personnage de jeu de société.
Enfin, il me semble nécessaire de revenir sur le fait que ces jeux, comme leur équivalent grandeur nature, ne sont pas faits pour être rejoués puisque les énigmes ont déjà été résolues. Il est toutefois possible de servir de Maître'sse du jeu pour des ami'e's, moyennant une bouteille d'eau pour ne pas être à court de salive.
Épaisseur du paquet. Les différentes couleurs de cartes permettant de le diviser en plusieurs piles sont visibles.
Pour conclure, ce jeu est loin d'être mauvais et constitue selon moi une ingénieuse façon d'adapter un jeu grandeur nature en jeu de carte. La plupart des défauts listés ci-dessus peuvent facilement être corrigés par les auteurices du jeu (traduction, scénario, instructions complémentaires, temps mis à disposition...) ou contrebalancés par l'équipe avec un peu d'ingéniosité. À titre personnel, je vous conseille de ne pas vous prendre la tête avec le chronomètre et de jouer à votre rythme (sauf si vous avez une passion pour le speedrun d'Escape Games, auquel cas c'est à vous de voir) afin de profiter au maximum de votre expérience de jeu. La présence d'une personne ayant déjà joué est optionnelle mais peut, à mes yeux, être un plus, à la fois pour vous aider à gérer les différentes piles de cartes mais aussi car cette personne a la possibilité de reformuler les instructions au besoin. Pour ma part, je pense le proposer à des ami'e's (soit en prêt, soit en étant MJ), mais je considère que cette expérience n'est pas assez intéressante pour me donner envie d’aller m’acheter d'autres jeux de ce type. Cela reste toutefois un cadeau sympathique (actuellement affiché à 11,90 euros sur le site de Philibert) à offrir à des personnes qui aiment bien les énigmes, les Escape Game ou les jeux de société de manière générale, ainsi qu'aux personnes qui ont des affinités pour les jeux coopératifs... Quitte à leur parler des différents points de cet article (ou le leur partager directement) afin de leur permettre de rebondir facilement en cas de problème durant leur propre partie.
Dans tous les cas, je vous souhaite à toustes une excellente année 2020, j'espère qu'elle sera merveilleuse et dans tous les cas, si vous le pouvez et si vous le voulez, cultivez-vous !
Hel
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